Étude : Le Camp des Milles
Le Camp des Milles
Ouvert en septembre 1939 au sein de la Tuilerie, située entre Aix-en-Provence et Marseille, le camp des Milles connut un peu plus de trois ans d'activité, et vit passer plus de 10 000 internés originaires de 38 pays, parmi lesquels de nombreux artistes et intellectuels.
Son histoire se divise en plusieurs phases correspondant aux différentes catégories d'internés qui y séjournèrent : ressortissants du Reich et légionnaires, étrangers désireux d'émigrer, juifs ayant fait l'objet de rafles.
On peut lire, à travers ces phases, l'évolution tragique de la répression dont furent victimes les étrangers et surtout les juifs sous le régime de Vichy, évolution qui culmina en août et septembre 1942, avec la déportation de plus de 2 000 hommes, femmes et enfants juifs vers Auschwitz, via les camps de Drancy et de Rivesaltes.
Le camp des Milles est aussi un lieu de mémoire car aujourd’hui il permet de transmettre l'histoire d'un lieu qui, de 1939 à 1942, va rejoindre progressivement l'histoire tragique de la Shoah.
Mais qu’est-ce qu’un lieu de mémoire ?
La notion de lieu de mémoire signifie l’ensemble des repères culturels, lieux, pratiques et expressions issues d’un passé commun. Ces repères peuvent être concrets et tangibles, comme des objets ou monuments, mais ils peuvent aussi être immatériels, comme l'Histoire, la langue, ou les traditions. Les lieux de mémoire sont non seulement des objets de connaissance, mais doivent également se révéler des sources d’émotions. Les traces du passé prennent un sens nouveau lorsqu’elles deviennent Mémoire en prenant appui sur des supports vivants et contemporains. La Mémoire prend vie quand elle rejoint le citoyen.
S'appuyant sur la force du lieu et sur son histoire, il s'agit aussi de montrer jusqu'où peut aller le rejet de l'Autre, par une présentation des mécanismes individuels et collectifs qui mènent au génocide. Plus largement, le Site-Mémorial est un lieu de formation et de rencontre entre les mondes de l'éducation, de l'art et des sciences. Ainsi l'ensemble du site s’adressent à tous les publics. Il est donc important de se souvenir, pour transmettre aux enfants et aux adolescents l'histoire du lieu et les leçons que l'on peut en tirer aujourd'hui.
Le Site-Mémorial a été conçu, principalement pour les jeunes, non seulement comme un musée d'histoire et un lieu de mémoire préservé, mais aussi comme un espace de culture patrimoniale et artistique et comme un "musée d'idées", un laboratoire innovant dans son contenu comme dans ses dispositifs pédagogiques.
Ainsi, pour la première fois au monde, le Site-Mémorial du Camp des Milles fournit, sur un lieu de mémoire, des repères pluridisciplinaires et des clés de compréhension qui peuvent aider à être vigilant et à réagir à temps face aux crispations identitaires et aux extrémismes.
Son action éducative et culturelle est destinée à renforcer la vigilance et la responsabilité des citoyens face au racisme, à l'antisémitisme et à tous les fanatismes :
- En s'appuyant d'une part sur la mémoire et l'histoire de la Shoah et les crimes de masse commis pendant la Seconde Guerre mondiale, ainsi que sur les résistances à ces crimes,
- En tirant parti d'autre part des acquis scientifiques permettant de comprendre, dans un but de prévention, les processus individuels et collectifs qui peuvent conduire à ces crimes, ainsi que ceux qui permettent de s'y opposer.
Pour passer du racisme au crime de masse, il faut qu’il y ait du terreau qui corresponde aux préjugés et tensions sociales puis que le diable naisse dans le quotidien (1ère étape), que l’on passe de la démocratie au régime autoritaire (2ème étape) et qu’il y ait une extension des persécutions et des menaces contre tous (3ème étape).
On peut en conclure que rien faire, c’est laisser faire, si on ne résiste pas à cet engrenage.
Les 3 grandes phases du camp des Milles :
Première phase : Septembre 1939 à juin 1940 : un camp pour "sujets ennemis"
L'histoire du camp débute sous la IIIe République, au début de la Seconde Guerre mondiale, lorsque le gouvernement français prend la décision d'interner les ressortissants du Reich, fussent-ils d'authentiques antifascistes ayant fui de longue date le nazisme qui sévissait dans leur pays d'origine pour venir se réfugier en France.
Considérés paradoxalement et tragiquement comme des "sujets ennemis", les internés sont victimes d'un mélange de xénophobie, d'absurdité et de désordres administratifs ambiants et vivent dans des conditions très précaires. Dans le Sud-Est, ces étrangers sont internés dans la Tuilerie des Milles, alors désaffectée. Ce bâtiment industriel devient un camp d'internement sous commandement militaire français.
Deuxième phase : Juillet 1940 à juillet 1942 : un camp pour "indésirables"
En juin 1940, s'ouvre une seconde période avec la défaite française et la signature de l'armistice. C'est là que se situe l'épisode du "Train des Milles", popularisé par le film de Sébastien Grall. À partir de juillet, sous le régime de Vichy, le camp est rapidement surpeuplé (3 500 internés à la fois en juin 1940).
Au cours de cette période, sont transférés aux Milles notamment les étrangers des camps du Sud-Ouest, et en particulier des anciens des Brigades internationales d'Espagne ainsi que des Juifs expulsés du Palatinat, du Wurtemberg et du pays de Bade.
À partir de novembre 1940, le camp, passé sous l'autorité du Ministère de l'Intérieur, devient le seul camp de transit en France pour une émigration Outre-Mer, transit régulier ou illégal avec l'aide de particuliers, d'organisations ou de filières locales et internationales.
Au fil du temps, les conditions d'internement se dégradent : vermine, maladies, promiscuité, nourriture insuffisante...
Troisième Phase : Août et septembre 1942 : un camp de déportation des Juifs
Wagon de déportation vers Auschwitz
Une troisième période correspond aux mois d'août et septembre 1942 qui voient la déportation vers Auschwitz via Drancy ou Rivesaltes de plus de 2 000 Juifs, hommes, femmes et enfants. Vichy a accepté de livrer 10 000 Juifs de la zone dite "libre" à l'Allemagne. Au début du mois de juillet 1942, Laval propose d'inclure les enfants âgés de moins de seize ans dans les déportations.
Auschwitz : un camp de concentration et d'extermination
Le 3 août, le camp est bouclé. Femmes et enfants juifs de la région sont orientés vers les Milles pour rejoindre les autres internés avant d'être déportés. Ne sont pas épargnés les Juifs réfugiés politiques ou étrangers ayant servi dans l'armée française. Plus d'une centaine d'enfants et adolescents juifs furent déportés du Camp des Milles en août et septembre 1942, le plus jeune avait un an. Au total, cinq convois sont constitués. En réaction, des hommes et femmes courageux aident les internés et les déportés.
Tas de chaussures à Auschwitz
Ces événements surviennent avant même l'occupation allemande de la zone Sud (11 novembre 1942). Au-delà du mois de septembre 1942, le camp, demeurant un centre de transit, vivote : ses derniers occupants, très peu nombreux, quittent ses murs de briques en décembre 1942.
Tas de valises à Auschwitz
Lors d'une sortie pédagogique en 3ème, en histoire, l'une de nous a pris des photos du Camp des Milles :
Maquette du Camp des Milles
Chemise d'un déporté
Four pour les tuiles
Entrée du théâtre
Entrée du théâtre
WC
Etage
Etage
Etage
Wagon de déportation
Cour
Cour
Cour
Cour